Construire une relation de confiance avec de potentiels financeurs en amont de sa levée, est essentiel pour construire un board qui t’accompagne dans tes challenges. Marion Schuppe, co-directrice du fonds d’investissement de makesense, te donne ses conseils pour y parvenir.

Le temps long et la relation humaine

“C’est plus un marathon qu’un sprint.

Une levée prend du temps. Il y a le roadshow, le temps de discussion avec les investisseur·ses jusqu’au moment ou on reçoit l’argent. Mais avant, il y a un temps caché. Celui de la prise de contact, de la prise de connaissances des investisseur·ses. Il est clé et peut-être plus long que le roadshow lui-même, car il faut définir le genre d’investisseur·se qu’on souhaite, puisque cela sera un partenariat long et profond. Il faut donc être aligné sur la vision de la boite, de la société, et de ce qu’on veut faire. Le fit humain est essentiel pour pouvoir travailler ensemble pendant plusieurs années.

Le temps est différent selon l’interlocuteur·rice et le montant demandé. La temporalité va dépendre du montant de la levée et par conséquent de l’interlocuteur·rice. Par exemple, pour 100k€, tu te tourneras davantage vers des investisseurs individuels, comme des Business Angels (BA), des family offices ou du crowd equity. Ils ont des profils très différents : 

👉 Les Business Angels. Un BA apporte des fonds, mais aussi une expérience. Celle-ci sera sectorielle ou entrepreneuriale (à absolument prendre en compte). Ils sont trouvables grâce aux groupes de BA réunis en club. Tu peux aussi les trouver sur Lita.co ou sur WiSeed. Ils sont assez proactifs et vont à la rencontre d’entrepreneur·ses, se regroupent autour de programmes. Le contact humain et la relation humaine est beaucoup plus forte qu’avec des fonds ou des acteurs publics.

👉 Les fonds d’investissement. Il y a plusieurs grandes étapes pour trouver le bon fonds. D’abord, identifie les bons fonds et la bonne personne à contacter. Souvent, au sein des fonds, les personnes se spécialisent par secteur ou par stade de maturité. Puis, demande une mise en relation via une connaissance. Cela est clé car les investisseur·ses sont très occupés et privilégient les mises en relation interpersonnelles. Fais le lien entre ton projet et les attentes du fonds. Enfin, donne des nouvelles : plus la relation aura été longue avant le financement, plus les échanges concernant la levée seront facilités. Cela peut se faire, par exemple, en envoyant une newsletter ou même une vidéo aux financeurs tous les trimestres pour leur permettre de garder ton nom en tête et d’avoir de tes nouvelles. Il est important de planifier des appels tous les trimestres pour nourrir ce lien. La se construit et s’entretient.

La prise de contact

Un simple email informant que tu as envie de lever des fonds, sans pitch-deck (on t’en parle ici) ou détails du projet, n’intéressera que peu  tes interlocuteurs et interlocutrices. Le pitch-deck permet au fonds de très vite se positionner pour te répondre. Pour préparer le premier appel, l’investisseur·se te demandera un pitch-deck dans tous les cas. Il doit comprendre l’histoire du projet, le produit, le marché, la chaîne de valeur, la production, le chiffre d’affaire, l’équipe, là où vous voulez aller (la stratégie future), avec une roadmap annuelle (pourquoi et combien vous levez ?). Plus tu détailles, plus tu permets aux investisseur·ses de se projeter et de te rejoindre.

>  Il faut mieux envoyer ton deck début janvier plutôt que fin décembre, car les fonds ont des enjeux de closing en fin d’année.

Est-ce qu’on doit écarter un fonds qui a investi chez un de nos concurrents ? Oui. Cela évite d’envoyer des informations à la concurrence. 

La crise de l’investissement

Pour les levées de seed et de pre-seed, l’appétit au risque n’a pas changé, dans tous les cas, c’est risqué. Si tu lèves en série A et que tu es près de la rentabilité, il faut montrer que tu pourrais couvrir tes dépenses pendant encore 12 mois. Cela sera plus rassurant que de la croissance exponentielle. Donc, plus tu allonges ton runway (le nombre de mois avant d’avoir vidé ta trésorerie), plus tu garantis leur investissement pour pouvoir lever à nouveau en série B.

Les KPIs BtoC, à mettre en avant

C’est important de les mettre en avant, mais ce n’est pas utile d’avoir 100 KPIs. Choisis-en 3 principaux, pour évaluer la performance de ton business, et attèles-toi à progresser sur les KPIs clés dans les 6 mois avant ta levée de fonds.

La valorisation

Il est souvent question de la valorisation, surtout en ce moment, quand les fonds sont moins prêts à payer, mais tout dépendra du secteur et du stade de développement.

Pour les seed ou pre-seed. La valorisation est surtout déterminée par le nombre de personnes au capital. Si tu souhaites lever 500k€, tu ne dois pas accepter une valorisation à 500k€, sinon tu seras bien trop dilué·e. En règle générale, il ne faut paq viser plus de 15 ou 20% de dilution en pre-seed et seed.

Pour la série A. On utilise plutôt le multiple comparable. C’est une méthode de valorisation qui vise à déterminer un multiple en analysant plusieurs autres entreprises similaires à la tienne, puis à appliquer ce multiple à ton organisation. Elle prend en compte les entreprises du même secteur lorsqu’elles sont vendues, ainsi que la croissance du secteur. Cependant, c’est asymétrique… parce qu’un fonds spécialisé aura des informations sectorielles que tu n’auras pas. Tu peux tout de même trouver des ressources auprès de différents acteurs comme Avolta, qui produit des rapports trimestriels et fait des moyennes en fonction du secteur et du modèle.

Le pacte d’actionnaire

👉 Quelle gouvernance choisir ?

Tu dois te poser la question de qui tu souhaites avoir au board.

Pour les seed ou pre-seed, le board est souvent composé de 5 personnes dont les fondateur·rices et les co-investisseur·ses (2 personnes sur 3 ou 4), en fonction de ce qu’ils apportent au projet. Par exemple, le fonds makesense Seed I est forcément membre du board. C’est une condition, car ce fonds à de fortes demandes d’impact et un vrai souhait d’accompagnement des porteurs de projet.

Pour la série A, le board n’excède pas 7 personnes, en gardant une représentation des investisseurs financiers, des porteurs de projet et un membre externe. Il est donc important de se demander quelles expertises et compétences tu recherches. Il y a plein de bonnes pratiques sur comment on monte un board et comment le faire vivre : composition, rituels, ordre du jour optimal, documents et informations à transmettre. La transmission d’information stratégique est essentielle pour permettre à tout le monde de participer à la prise de décision. Par exemple, tu es en BtoC et tu souhaites te lancer en BtoB. Tu dois partager avant le board des documents permettant à tout le monde de participer activement à la prise de décision. L’idée est de profiter des moments de board pour mettre tous les cerveaux autour de la table.

👉 Quelles clauses mettre ?

En face d’une valorisation, un·e investisseur·se veut des garanties, au cas où ça se passerait mal. Pour cela, il y a des clauses pour se protéger. Par exemple, les clauses de non dilution, les clauses de remboursement préférentiel (pour récupérer l’argent avant d’autres actionnaires) ou les clauses drag along (pour déterminer la personne qui décide ou non d’une offre de rachat).

Le Galion propose les clauses standards et standards de marché pour chaque clause avec une vision très entrepreneur friendly.

Les fonds Evergreen

Les fonds Evergreen, qui n’ont pas de date de fin, n’ont pas nécessairement des clauses de sortie strictes. Cependant, ils ont toujours besoin de perspectives de sortie. Il ne faut pas négliger cet aspect. L’intérêt est de te laisser plus de temps.

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