Tu aimerais que ta boite devienne entreprise à mission mais tu de demandes comment faire, si ce n’est pas trop lourd, trop contraignant, trop tard ? On t’explique pas à pas comment opérer ta mue !

Les fondamentaux de l’entreprise à mission

👉 Une mission contributrice au bien commun

  • Une raison d’être qui décrit la contribution de la société à la résolution d’un problème sociétal identifié.
  • Des objectifs sociaux ou environnementaux à poursuivre ancrés dans les opérations de la société.

👉 Un comité de mission (ou référent)

  • Nouvelle gouvernance protectrice de la mission, distincte des organes sociaux existants.
  • Composé d’au moins un salarié, chargé exclusivement du suivi de la mission.
  • Présente annuellement un rapport joint au rapport de gestion pour approbation des comptes.
  • Référent mission si moins de 50 salariés.

👉 Un organisme tiers indépendant

  • Réalise un audit pour rendre compte de la déclinaison de la mission dans les activités de l’entreprise.
  • Vérification tous les 2 ans de l’exécution des objectifs sociaux et environnementaux (3 ans si moins de 50 salariés).
  • Une qualité révocable si l’organisme conclut que les objectifs ne sont pas respectés.

Concrètement, comment devenir entreprise à mission ?

1️⃣ Co-construire sa mission –6 à 18 mois si on part de zéro

  • Impliquer tous les niveaux dans l’entreprise.
  • Travailler avec les parties prenantes : actionnaires, clients, partenaires, fournisseurs.
  • S’appuyer sur les origines de l’entreprise, sa culture et ses valeurs.
  • Projeter l’entreprise dans l’avenir : raison d’être, utilité et contribution sociétale.

👉 Une mission suivie et pilotée dans le temps

  • Identifier les responsables de la mission et du reporting.
  • Établir une gouvernance associée à la mission, définir les rôles (collaborateurs, managers, direction, comité de mission, etc.).

2️⃣ Adopter la qualité de société à mission –1 jour

  • Rédaction des statuts incluant la raison d’être, les objectifs, ainsi que le fonctionnement et la composition du comité de mission, suivie du vote de ces nouveaux statuts en Assemblée Générale.
  • Remplissage et dépôt du formulaire CERFA avec les statuts au greffe du Tribunal de Commerce.
  • Complétion d’un questionnaire pour être listé en tant que société à mission auprès de l’Observatoire des Sociétés à Mission.

3️⃣ Vivre sa mission –toute la vie

  • Traduire la mission en objectifs opérationnels concrets et mesurables.
  • Veiller à ce que la stratégie de l’entreprise serve sa mission et non l’inverse.
  • Impliquer chaque membre de l’entreprise dans la mission, en intégrant cette dernière dans les objectifs des équipes, et en accompagnant les changements nécessaires.
  • Instaurer et dynamiser le comité de mission.
  • Se préparer aux évaluations de l’organisme tiers indépendant (OTI).

Comment définir sa mission ?

On t’explique tout dans cet article. En complément, lorsque l’on devient entreprise à mission, il est nécessaire de décliner la mission en objectifs opérationnels et en plan d’action.

👉 Un objectif statutaire est un choix

  • La raison d’être éclaire la finalité de l’entreprise et sa contribution à la société.
  • Les objectifs statutaires :
    • Ancrent la raison d’être dans les opérations quotidiennes.
    • Représentent des compromis nécessaires pour progresser vers la raison d’être.
    • Sont essentiels, déterminant des actions responsables, parfois au détriment d’autres opportunités.

Il faut évaluer chaque objectif statutaire pour s’assurer qu’il soit crucial pour l’avancement de l’entreprise et qu’il corresponde aux pratiques responsables envisagées.

👉 Se doter d’un référentiel pour suivre et crédibiliser la mission

  • Diriger et mesurer le progrès de la mission.
  • Fournir des preuves concrètes des réalisations.
  • Permettre au comité de mission d’évaluer l’efficacité avec un référentiel initial et le peaufiner ensemble.

⚠️ Attention au nombre de KPIs pour garder un référentiel maniable sur le long terme.

👉 Pour voir des exemple de raison d’être et d’objectifs statutaires, vous pouvez jeter un coup d’œil à ceux des entreprises à missions répertoriés ici.

Définir son comité de mission

En dessous de 50 salarié·es, il est possible de nommer uniquement un·e salarié·e référent·e de la mission, c’est au delà de 50 salarié·es que le comité de mission devient obligatoire. Cependant, même en dessous de 50 salarié·es, avoir un comité de mission permet d’associer des parties prenantes internes et externes au pilotage de la mission et donc renforcer le niveau d’exigence dans l’exécution de la mission.

On peut voir le rôle du comité de mission a 2 niveaux :

  • NIVEAU 1 : évaluer l’efficacité des actions passées par rapport aux objectifs sociaux et environnementaux. C’est le minimum que la loi demande, et dont elle confie la vérification à un Organisme Tiers Indépendant (OTI)
  • NIVEAU 2 : Questionner la pertinence des actions et des stratégies choisies pour répondre du mieux possible à sa mission. A ce second niveau, la société réfléchit régulièrement aux autres stratégies possibles, et acquiert une meilleure connaissance des enjeux et des risques auxquels elle fait face.

Le comité de mission idéal est composé de profils variés, complémentaires, et aux expertises pertinentes pour des échanges riches. Il est intéressant d’y associer des parties prenantes capables de jouer le rôle de “critical friends” qui ne seront pas uniquement complaisant mais capable de pousser l’entreprise plus loin. N’oublie pas de t’assurer que les membres soient suffisamment indépendants. Tu peux y convier des représentant·es de tes bénéficiaires ou client·es, des scientifiques ou expert·es de ton secteur d’activité, des dirigeant·es d’ONG ou d’associations oeuvrant dans ton secteur d’activité.

L’animation du comité demande d’y consacrer les ressources nécessaires (temps et informations) pour que les membres soient en possession de suffisamment d’information pour exercer ce rôle de critique constructive.

Lors des réunions :

  • Communiquer les éléments pertinents en amont
  • Dédier du temps aux deux niveaux d’évaluation demandés

En dehors des réunions  :

  • Nourrir régulièrement ou sur demande les membres d’informations complémentaires
  • Proposer des temps d’échanges individuels pour creuser certains sujets
  • Créer un esprit de groupe et l’entretenir

Choisir son Organisme Tiers indépendant (OTI) = l’auditeur

Lorsque l’on devient entreprise à mission, on s’engage à être audité·e tous les 2 ans (ou tous les 3 ans si moins de 50 salarié·es) afin de pouvoir garder cette qualité de société à mission. Si tu ne réalises pas cet audit ou si l’auditeur émet une analyse négative, tu prends le risque de te voir retirer la qualité de société à mission, et surtout de faire l’objet d’un bad buzz en étant accusé·e d’impact washing.

Il y a encore peu de recul sur la façon dont ces audits vont être réalisés puisque les premières sociétés à mission datent de 2020 et ont donc été auditées en 2022. Les auditeurs et auditrices analysent les moyens mis en oeuvre par la société pour exécuter la mission qu’elle s’est donnée. Ils vont se baser sur la déclinaison de la mission en objectifs opérationnels annuels et demander à l’entreprise et au comité de mission de fournir des preuves de ce qui a été fait en vu d’atteindre ces objectifs.

La liste des OTI est régulièrement mise à jour ici. Il s’agit de cabinets d’audit classiques qui ajoutent la corde OTI à leur arc, ou de cabinets de conseils (souvent spécialisés sur le sujet de l’entreprise à mission) qui ajoutent une dimension audit.

Comme pour sélectionner tes experts comptables, tu peux mettre en concurrence plusieurs OTI et sélectionner la proposition qui te semble la plus adaptée à tes besoins et à ton budget. Le coût de l’audit dépend de la taille de ta structure et donc du nombre de jours nécessaires pour l’audit.

Exemples de rapports de mission

La fiche de poste du manager de la mission

  • Diffuser la mission aux collaborateurs et collaboratrices pour rendre chacun·e acteur·rice de la mission.
  • Intégrer la mission dans les pratiques quotidiennes de l’entreprise : grille d’arbitrage pour prendre les décisions, management, ressources humaines, objectifs…
  • Piloter la construction du modèle de mission avec l’interne et le comité de mission : identification des objectifs opérationnels, des indicateurs, des preuves, formalisation de la trajectoire.
  • Piloter le suivi de l’exécution de la mission
  • Aligner la stratégie avec la mission et s’assurer de la contribution des orientations stratégiques avec la mission
  • Structurer et animer les travaux du comité de mission
  • Coordonner et/ou rédiger avec le comité de mission le rapport du comité de mission
  • Préparer les audits par des organismes tiers indépendants pour valider la mission et être leur interlocuteur privilégié

Ses compétences : Connaissance de l’entreprise, des enjeux stratégiques et sectoriels, appétence pour les sujets de responsabilité et de contribution, connaissance du modèle de la société à mission, gestion de projet, reporting.

Ses savoirs être : Esprit fédérateur, capacité à échanger avec les niveaux de l’entreprise, capacité à écouter et à se faire entendre, être structuré, autonome et force de proposition.

Devenir entreprise à mission dès le démarrage de son projet

Comme on vient de le voir, pour devenir à mission, les contraintes administratives ne sont pas insurmontables, il suffit de :

  • définir sa raison d’être et des objectifs sociaux ou environnementaux long terme qui doivent être inscrit dans les statuts
  • de décrire la façon dont l’exécution de la mission va être suivi. Quand on a moins de 50 salarié·es, il n’est pas obligatoire d’avoir un comité de mission, on peut nommer un·e salarié·e qui sera référent·e mission
  • de remplir un CERFA, à déposer aux greffes en même temps que les nouveaux statuts.
  • garder en tête qu’un audit aura lieu 2 ans plus tard puis tous les 3 ans (18 mois puis tous les 2ans si on passe la barre des 50 salariés) pour vérifier que l’entreprise a bien exécuter la mission qu’elle a décrite dans ses statuts.

Cependant, quitte à devenir entreprise à mission, autant faire les choses bien et en profiter pour fédérer des acteurs et actrices autour de sa mission et renforcer sa stratégie d’impact. Pour cela, chez makesense, on recommande :

  • d’associer ses principales parties prenantes au travail de définition de la raison d’être et des objectifs statutaires. C’est l’occasion de réaffirmer votre mission auprès d’eux.
  • même si ça n’est pas obligatoire pour moins de 50 salarié·es, nous recommandons de mettre en place un comité de mission associant des parties prenantes externes dès le début. C’est l’occasion de travailler sur sa gouvernance pour qu’elle soit plus participative et de poser un comité qui pourra jouer les gardes-fous sur l’impact tout au long de la mission.
  • de faire un réel travail de déclinaison des objectifs statutaires (souvent très macro) en objectifs opérationnels annuels afin de garder le cap sur votre mission et faciliter le processus d’audit qui aura lieu au bout de 3 ans.

Les conseils de makesense

  • Les objectifs que tu inscris dans tes statuts doivent être long terme (pour éviter de remettre les statuts à jour tous les ans) et suffisamment génériques pour permettre la souplesse dont tu as besoin au démarrage du projet (quand on a moins d’un an d’existence, il n’est pas réaliste de donner des chiffres précis à 5ans). Les auditeurs baseront leurs audits sur ce que tu as mis en oeuvre pour atteindre les objectifs décrits dans tes statuts, assure-toi d’y mettre des objectifs qui seront encore d’actualité dans 5 ans.
  • sois très concret·e et spécifique dans la manière dont tu traduis ces objectifs en une feuille de route annuelle qui te guidera au quotidien pour garder la mission au cœur du pilotage de ton projet. C’est cette déclinaison en objectifs opérationnels qui te permet de ne pas tomber dans le bullshit et de produire des preuves aux auditeurs et auditrices.

Cet article est le 3ème chapitre du dossier « Avoir une mission sociale ou environnementale au cœur de l’organisation ». Découvre les autres chapitres : 

  1. Définir sa mission au service du bien commun
  2. L’entrepreneuriat à impact, l’entreprise à mission : quelles différences ?
  3. Devenir entreprise à mission
  4. Devenir ESUS
  5. Devenir B Corp

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