« Aujourd’hui le lobbying, c’est le capitalisme poussé à son paroxysme », explique Hugo Cartalas, cofondateur de Greenlobby. Pour faire entendre sa voix et revendiquer le changement, il existe un levier de taille : le plaidoyer. Basé sur la coopération entre acteurs du secteur, il fera bouger les lignes plus rapidement et efficacement.

🌱  Cette ressource est en lien avec le quatrième pilier de l’entrepreneuriat 100% vivant que l’on défend : coopérer pour mieux transformer son secteur. 

Qu’est-ce que le plaidoyer ?

Des actions de plaidoyer sont des actions menées à destination des décideurs politiques, dans l’optique de faire changer la loi. Il s’agit d’un discours écrit en faveur de quelqu’un, d’une idée, etc. qui combat une doctrine ou une institution.

Le plaidoyer est un moyen de fédérer sa communauté et de défendre les causes pour lesquelles on se bat. Plusieurs termes désignent (plus ou moins) la même chose : plaidoyer, lobbying, campagne d’influence, relations publiques, relations de presse. De manière plus claire, c’est dès que tu prends la parole sur des sujets de société en te faisant entendre auprès des acteurs économiques, politiques, médiatiques, etc.

Le plaidoyer au service de ton projet

Attention, la loi peut ouvrir de nouveaux marchés ou donner un coup d’arrêt à ton développement. Une loi, ce sont des millions d’acteurs (économiques) impactés. Il faut savoir que lois ont majoritairement été influencées par les acteurs économiques dominants des dernières années. Elle sont donc rarement favorables (voire hostiles) aux entrepreneurs à impact.

Quelques exemples d’impact de la législation sur le développement d’entreprises à impact et inversement : 

1. Les projets qui ont grandi grâce à la loi

Les startups liées à la lutte contre le gaspillage alimentaire, comme Phenix ou TooGoodToGo, ont vu leur développement favorisé par la loi Garot. Il en est de même pour les startups liées au reconditionnement, comme Murfy, BackMarket ou Vesto, qui bénéficient d’un environnement favorable grâce à la loi AGEC.

2. Les projets qui ont impulsé un changement de loi

Les fondateurs d’Ynsect, entreprise crée en 2011, ont eu l’idée de nourrir les poissons d’élevage avec des insectes (et non d’autres poissons). En créant une alliance avec l’IPIFF (International Platform of Insects for Food and Feed, l’organisation qui promeut l’utilisation d’insectes et de produits dérivés comme source de nutriments de premier ordre pour la consommation humaine et l’alimentation animale), ils ont réussi à influencer l’EFSA (l’Autorité européenne de sécurité des aliments) et à changer les normes et la réglementation dans ce domaine.

Depuis le 1er juillet 2018, grâce à leur mobilisation, l’Union européenne autorise les fermes aquacoles à nourrir leurs poissons avec des protéines issues de larves d’insectes. Depuis, Ynsect a multiplié par 4 son CA et levé 732 millions de dollars.

3. Les projets qui ont disparu, faute de réglementation favorable

Trois jeunes entrepreneurs toulousains ont lancé en 2016 la Boucle verte, une entreprise de recyclage de cannettes en aluminium. Le problème, c’est qu’aujourd’hui en France il existe très peu de lois qui régissent le recyclage des déchets. Ils ont finit par fermer boutique car la majorité des déchets ne valent pas le prix de l’effort qu’il faut pour les collecter.

6 conseils pour construire sa stratégie de plaidoyer

1. Étudier l’environnement légal et réglementaire dans lequel tu évolues

Quel est ton environnement ? Est-ce que tu peux avoir des avantages législatifs et fiscaux ? Y a-t-il déjà des lois qui régissent ton marché ?

2. Faire le power-mapping de ton projet

Qui sont ceux qui ont les moyens de te faire connaitre et d’influencer l’environnement législatif à venir de tes activités ? Qui sont les acteurs de ton secteur qui ont les mêmes problèmes que toi ? Quels collectifs prennent la parole sur des sujets qui te touchent ? As-tu identifié des tribunes qui prennent position sur tes sujets ?

Parmi les acteurs à rechercher : syndicats, associations et ONG, groupes de pression, réseaux sociaux, maires, députés et sénateurs, gouvernement, influenceurs, etc.

🦸 La power map

La power map est un outil qui permet d’identifier le niveau de support (plutôt favorable ou défavorable à ton projet) et de puissance des différents acteurs de ton secteur en les plaçant sur une carte (voir exemple ci-dessus). Il faut commencer par des petit pas pour faire bouger les gros dans le power mapping, identifier les acteurs puissants du secteur pour aller collecter de l’argent et faire bouger les lois.

3. Construire des alliances

“Le principe de base dans le lobbying est de se mettre en collectif, surtout quand on est petit” – Hugo Cartalas

D’abord, il faut se structurer avec son secteur. Il est crucial d’accepter d’entrer dans une logique de coopération. Les décideurs politiques sera uniquement en mesure de poser un cadre légal systémique favorable à ton secteur si vous arrivez à parler d’une même voix. Par exemple, En mode Climat. 

Puis, il faut développer un narratif commun et multi-acteurs. Choisissez vos combats et construisez un plaidoyer rigoureux, chiffré avec des propositions concrètes qui pourront être repris par des politiques.

“Pour être reçu et écouté, il faut peser. Tu pèses en fonction du nombre de personnes que tu représentes, de la qualité de tes idées, de la pression médiatique. Il faut se créer un pouvoir institutionnel, médiatique et symbolique. Ce n’est pas parce que ce que tu dis est bien que tu es reçu et écouté mais parce que tu as un moyen de pression.” Julia Faure – cofondatrice de Loom et En mode Climat.

4. Prendre la parole

Tu peux prendre la parole en publiant une tribune co-signée dans de grands médias, ou en exprimant tes convictions et revendications sur les réseaux sociaux. 

« On a rassemblé 80 marques textiles et publié une tribune dans le monde : “Nous, marques textiles, demandons à être plus régulés” signée par 80 personnes. La Tribune a fait du bruit, donnée lieu à une question au gouvernement à l’assemblée. La pression médiatique s’est installée. j’ai compris à ce moment là l’intérêt des tribunes. c’est un moyen de pression pour se positionner sur les échiquiers. » Julia Faure – cofondatrice de Loom et En mode Climat

4. Aller au contact

Pour entrer en contact avec eux (afin de connaitre l’élu proche de chez toi, celui ou celle le plus susceptible d’être intéressant pour toi), utilises ces outils : https://www.nossenateurs.fr/https://www.nosdeputes.fr/, Mailing-list par commissions

Voici une structure d’email court et impactant à un élu. 

Bonjour Madame/monsieur le/la député.e

2 lignes – ton organisation, ta solution

1 paragraphe – un contexte rappelant ce qu’il se passe en ce moment à l’assemblée ou sur le territoire en lien avec ton sujet. Exemple : En ce moment de projet de loi finance, donc c’est le moment de mettre en place au sein…

1 paragraphe – ce que tu proposes, grâce à ta solution et des moyens mis en place.

2 lignes pour les next steps – Nous restons à votre disposition pour vous présentez ce projet. En attendant, vous trouvez en pièce jointe des documents détaillés. Cordialement.

6. S’appuyer sur sa communauté

L’un de tes atouts : les millions de citoyens engagés pour la solidarité et l’écologie. N’hésite pas à mobiliser tes premiers ambassadeurs à participer à une campagne de mailing pour des députés. Le pouvoir de la communauté est souvent sous-estimé.

« Pour gagner des batailles politiques, il faut y aller en collectif et ne pas le faire pour toi ou pour ta marque. Il faut donc que ton organisation soit assez solide pour s’investir dans le collectif. Si tu cherches à faire de ton plaidoyer une campagne de comm pour ton organisation, tu ne pourras pas fédérer de collectif dans le temps ». Julia Faure – cofondatrice de Loom et En mode Climat

Comment intéresser un élu

Il y a deux portes d’entrée différentes : entrée territoire et entrée thématique. Tu peux aller voir du côté circonscription avec les attachés parlementaires terrain, ou trouver celles et ceux qui s’intéressent à ta question.

C’est difficile d’obtenir un rendez-vous parlementaire, il faut toujours se mettre à sa place. De même qu’avec un client lors d’un rdv commercial, demande-toi : « En quoi je peux lui être utile ? ». Tu peux aussi aller sur X et interpeller les députés. N’hésite pas à les relancer par mail. La période de campagne est particulièrement propice car ils sont plus à l’écoute de nouvelles idées .

“Le rendez-vous avec un décideur politique c’est comme un client : qu’est ce que je peux lui apporter ? Il a 40 000 demandes, donc rappelle-lui quels sont ces problèmes et comment tu réponds à tout cela avec ta solution“ – Hugo Cartalas.

En conclusion :

  • Fais le parler
  • Entends et cherche à comprendre toutes ses problématiques (les besoins de son territoires, les objectifs imposés par le ministère, etc.)
  • Montre lui les solutions envisageables
  • Crée une relation partenariale (qui pourra par la suite te permettre d’être mis en relation avec d’autres interlocuteurs : Ministères, académies, préfectures, etc.)

📚 Ressources pour aller plus loin : 

Template d’un amendement

https://www.nosdeputes.fr/

Mailing-list par commissions : pense bien à mettre tout le monde en CCI. Pense à créer une boucle avec “Madame la députée” et une boucle avec “Monsieur le député”.

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