Refuges LPO, créez votre gîte trois étoiles pour la faune sauvage

Refuges LPO, créez votre gîte trois étoiles pour la faune sauvage

Les refuges LPO, havres de biodiversité chez les particuliers, offrent aux oiseaux de quoi se refaire une santé.
10 May 2023
par Hélène Binet
5 minutes de lecture

On en trouve à toutes les altitudes avec l’accès gratuit au gîte et au couvert. Les refuges LPO, havres de biodiversité chez les particuliers, offrent aux oiseaux de quoi se refaire une santé. Vous rejoignez la communauté des gardiens de la vie sauvage ?

Vous les avez sans doute déjà aperçues. Ces petites plaques de la taille d’une ardoise placées sur le portail d’un jardin, au pied d’une balconnière, accrochées à un arbre. Elles distinguent les refuges LPO, ces espaces de nature de 4m2 à plusieurs hectares que des particuliers ont décidé de choyer. 

Moi, Hélène, Paris 10e, je fais partie des 40 000 gardiens et gardiennes de refuge. La cour de mon immeuble qui compte des plantes en pot, des fleurs en bac, des bacs en vrac, des arbustes, une haie de lierre, des seaux récupérateurs d’eau de pluie mais aussi des vélos, un chat, des enfants, des voisins, des arrosoirs, un lombricomposteur, des orties, arbore depuis quelques mois son étiquette : « J’aime la nature en ville ». Affublée des deux macareux sur fond bleu qui composent le logo de la Ligue pour la protection des oiseaux, institution naturaliste depuis 1912, elle atteste de mon engagement écologique pour faire de mes 50m2 de cour une zone d’accueil de la vie sauvage. La Jane Goodall Paris centre ? C’est moi !

Les 4 commandements de la biodiversité

En réalité, la manip pour devenir refuge LPO n’est pas très compliquée et à moins de pulvériser chaque matin du roundup sur ses plantes, la gloire est à la portée de chacun. Lors de l’inscription sur le site, je me suis engagée à respecter la charte LPO, à savoir… 

1. Interdire la chasse sur mon refuge

À première vue, l’exercice semble facile. J’habite en ville, je n’ai pas de flingue mais il n’y a pas que moi. Il y a quelques années j’aurais été obligée d’expliquer à Virgule (mon chat) que les croquettes c’est bien meilleur que les bergeronnettes, mais la bête prenant de l’âge les oiseaux n’ont plus de souci à se faire. Si ce point 1 est OK pour moi, le sujet “chat” est un vrai sujet. On estime que la bête serait responsable de la mort de 1,3 à 4 milliards d’oiseaux et 6,3 à 22,3 milliards de petits mammifères chaque année dans le monde. Mais rassurez-vous, il existe plein d’astuces pour faire cohabiter faune sauvage et faune domestique et on peut tout à fait être refuge LPO avec un matou. Il suffit de suivre les précieux conseils de l’association qui sont juste ici.  

2. Renoncer aux produits chimiques

Ça c’est la base : le roundup dans ton jardin tu n’utiliseras pas ! Chez moi  tout est naturel, les plantes et la terre viennent de la vallée de Chevreuse (30 kilomètres) en direct de mon pépiniériste chéri de la Ruche qui dit Oui !, les lombrics transforment mes épluchures en thé/engrais, je chasse les pucerons à coup de savon noir. Je conspue Bayer et consorts au petit déjeuner. Bref, ça passe crème. De toute façon, depuis le 1er juillet 2022, l’usage des produits phytosanitaires est interdit chez les particuliers. En revanche, les produits de biocontrôle, les produits qualifiés à faible risque et les produits dont l'utilisation est autorisée dans le cadre de l'agriculture biologique ne sont pas concernés par ces nouvelles interdictions. Allez hop, on fait tourner les recettes de purin d’ortie ! 

3. Réduire mon impact sur l’environnement

Côté jardin, je suis pas mal. Je récupère plantes et pots abandonnés sur le trottoir, je paille mes pots en été, j’arrose avec l’eau de lavage de la salade… What else ? Ah oui, faudrait que je m’abonne à la super revue les 4 saisons, une institution dans le domaine de la permaculture au jardin. Vous connaissez ? 

4. Accueillir la faune et la flore sauvages

Là j’ai une vraie alliée, la haie de lierre qui sert de super planque pour les nids des oiseaux et offre des baies presque tout l’hiver. Niveau insectes c’est pas Micropolis mais je m’engage à leur fabriquer un mini hôtel spécialement pour eux avant Noël.

Pour être officiellement estampillée, je me suis aussi acquittée de 35 euros pour recevoir mon kit (avec un nichoir à mésange bleue et 3 guides pour m’accompagner), trouver chaque mois dans ma boîte mail la newsletter "l'Echo Refuges LPO », accéder à mon espace web personnalisé pour consigner mes prouesses dans le tableau de bord de mon Refuge et pouvoir, en prime, accéder aux conseils de la LPO par mail et téléphone.

Il était une fois Mormal…

Mais au fait, d’où vient donc cette idée de confier aux particuliers les clés de la biodiversité ? C’est à Adrien Legros, délégué LPO à Valenciennes que l’on doit en 1921 le tout premier Refuge LPO : « La Cabine » en forêt de Mormal, dans le Nord. Pour ré-ensauvager ce site dévasté par la première guerre mondiale, il souhaite favoriser le retour des oiseaux, véritables auxiliaires des cultures.  Des nichoirs sont installés ici et là, les pratiques sont encadrées. « La Cabine est, nous l’espérons, le premier anneau d’une chaîne que nous commençons de forger,» écrivait Adrien en 1921. Cent ans plus tard, les vœux du délégué ont été exaucés. Le réseau compte à ce jour 49 000 refuges, 40 000 chez les particuliers, 4000 dans les écoles, les Ehpads ou au sein d’associations, le reste dans des entreprises ou collectivités. Soit 62 450 hectares préservés.

Nichoir à moitié vide ou à moitié plein ?

Et tout ce réseau de jardins balcons, terrasses garantis sans pesticides ça change quoi pour la biodiversité en général et les oiseaux en particulier ? Lancé en 2012, l’observatoire des oiseaux des jardins, géré par la LPO et l’équipe Vigie-nature (Muséum national d'histoire naturelle et l’Office français de la biodiversité) apporte des réponses en demi-teinte. Il y a la version printemps-été plutôt flippante : au cours des dix dernières années, les effectifs de 41% des espèces rencontrées dans les jardins au printemps ont diminué, confirmant le déclin lié à la déstructuration globale des écosystèmes naturels déjà observé par ailleurs. Le Martinet noir (-46%) par exemple est l’une des victimes de la disparition des insectes volants due aux pesticides, de la récurrence des épisodes caniculaires et des rénovations de bâtiments qui réduisent ses possibilités de nicher sous les toitures. On peut se consoler en se disant que sans les 48 000 refuges, la situation aurait sans doute été pire.

À l’inverse, les résultats des comptages hivernaux mettent en évidence une augmentation pour près de la moitié des espèces, en particulier les granivores (le Chardonneret élégant, le Pinson des arbres), alors que leurs populations nationales sont pourtant en forte régression. Ce constat s’explique notamment par la raréfaction des ressources alimentaires dans les zones d’agriculture intensive et le report de ces oiseaux vers les jardins. Bonne nouvelle donc, dans les refuges on mange mieux qu’ailleurs. Allez, à vous la vie de bienfaiteur-restaurateur !


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